Chronophage et énergivore, le militantisme est un véritable don de soi. S’engager corps et âme pour une cause peut mener à un véritable épuisement militant. Mais qu’est ce qui fabrique cet épuisement ?
Revenons d’abord sur la notion même de militant. C’est quelqu’un qui s’engage librement et bénévolement à lutter pour défendre une cause politique ou un projet d’utilité sociale. Il existe également des militants professionnels, tout aussi engagés pour leurs causes, à la seule différence qu’ils en tirent un revenu.
La notion de Burn-out au travail est arrivée dans les années 70. Il s’agit d’un état chronique d’épuisement professionnel. L’individu se sent usé, vidé. Il n’a plus d’énergie pour affronter l’environnement professionnels et ses collègues, ni pour réaliser un travail qu’il voit comme dénué de tout sens, inutile et fastidieux.
L’épuisement militant ou burn-out militant, est une notion plus récente apparue dans les années 90 aux USA. L’état de stress lié au militantisme détériore la santé physique et émotionnelle de manière si accablante que cela affaibli l’engagement. Le militantisme alterne les moments de joie et de tristesse c’est pour cela que l’engagement militant, avec ses espoirs et ses déceptions, entraîne parfois des dé-pressions. Fort heureusement cela reste isolé et tous les activistes qui font face à des situations d’insatisfaction, de stress et de surcharge n’y laissent pas leur santé.
On peut distinguer plusieurs types de causes à cet état d’épuisement. Il y a tout d’abord des causes personnelles.
Les militants ont des liens forts avec les causes qu’ils défendent. Ils se mettent souvent une immense pression dans les luttes, en arrivant parfois, à se sentir coupables de faire une pause alors que d’autres souffrent d’injustices. À cela s’ajoutent des causes externes : en effet, on met une pression de plus en plus importante sur les militants syndicaux. Entre les violences policières, les poursuites judiciaires et les menaces de représailles, le stress est permanent.
Certaines autres causes sont liées aux luttes internes au sein des mouvements. Par exemple, les mouvements syndicaux permettent à leurs membres d’obtenir des compétences mais ils demandent un véritable don de soi. On sacrifie parfois une partie de son bien-être personnel au nom de la lutte.
Enfin, nous évoquerons les causes structurelles traduites par le sentiment d’impossibilité d’obtenir des changements structurels de la société. Les militants finis-sent désespérés ou cyniques.
Mais alors quelles pistes de solution pour que les individus qui s’engagent ne soient pas consumés par leur engagement face au sentiment d’impossibilité de changer le réel ?
Commencer par remettre l’importance de la lutte au cœur du débat. Même si les grandes victoires sont rares, il faut célébrer chaque petite car elles ont toutes leur importance. On peut pointer la victoire syndicale récente face à la Loi Van Van Quickenborne.
L’importante mobilisation a fait reculer les partis progressistes au gouvernement. Rouges et verts ont annoncé qu’ils ne voteraient pas le texte tant décrié de ladite « loi Van Van Quickenborne ». C’est une victoire militante, collective. Celle de la mobilisation sans faille, celle de la volonté commune qui a tant marché dans Bruxelles pour porter ce message : nous sommes manifestants, pas criminels ! Une lutte gagnée dans une époque où les pro-vocations et attaques contre le droit de grève sont de plus en plus importantes. C’est dans le conflit Delhaize que le mépris des libertés syndicales a atteint un sommet.
Entre les militants affublés d’astreintes, l’arrestation d’une déléguée avec les menottes, la fouille de Camarades avant l’entrée en Conseil d’Entreprise et les nombreuses intimidations… dans ce conflit les travailleurs et travailleuses luttent face à une direction inflexible qui peut compter sur le soutien des juges, des huissiers et de la police. Rappelons qu’une requête unilatérale a interdit aux syndicats d’empêcher l’accès aux magasins. Par cette décision, les tribunaux ont donc estimé que les intérêts économiques d’une entreprise sont plus importants que le droit de grève et l’action collective.
Il est temps de redonner du sens à nos luttes tout en s’assurant du bien-être des militants. Les combats doivent continuer, le contre-pouvoir de la résistance syndicale doit s’exercer. Comme l’a si bien dit Bertolt Brecht ‘’Celui qui combat peut perdre, mais celui qui ne combat pas a déjà perdu’’